Cal Mason jeta un dernier regard au Gemini, toujours en train d’essayer de s’extraire de l’attraction gravitationnelle de Yar, et à Penny et le reste de l’escadre se mettant en formation d’atterrissage.

Ça vaut le coup, pensa Cal. Le temps qu’il convainque l’Amiral Showalter que l’attaque Vanduul était plus qu’un simple vol, le clan Vanduul aurait disparu dans son territoire, et le commandement militaire n’autoriserait jamais une opération dans l’espace ennemi. Donc c’était dit. “Ça vaut le coup,” se répéta-t-il, et il chargea le fichier Navplan adéquat.

L’ordinateur prit le contrôle lorsque Cal plongea dans le point de saut. Il n’avait plus maintenant qu’à attendre, tandis que l’ordinateur se mouvait à travers l’interespace avec une perfection programmée, et à espérer que les Vanduul n’étaient pas installés de l’autre côté, les canons prêts à détruire n’importe quel idiot téméraire qui tenterait de les suivre… Hmm… Il aurait probablement dû songer à ça plus tôt.

Cal regarda le compte à rebours sur son écran. Il s’empara lentement des commandes de vol. Un doigt s’attardait au-dessus du projecteur de bouclier, au cas où.

Il déboucha de l’autre côté, prêt à tout, puis poussa un soupir de soulagement. Tout allait bien. Il pouvait voir le vaisseau amiral en train de rejoindre le reste de son clan; une flotte de transporteurs-ferrailleurs, cargos, petits destroyers et de ravitailleurs, probablement les fruits de centaines de combats durant des décennies d’errance.

Cal éteignit tous les systèmes extérieurs pour minimiser sa signature énergétique et coupa ses moteurs après s’être propulsé en direction de la flotte. Il devait pouvoir s’approcher d’assez près, à moins qu’ils ne changent de trajectoire. Pour le voir, il leur faudrait regarder par le hublot. Il n’apparaîtrait pas sur leurs scanners. Les gens comptaient trop sur leurs scanners et la technologie pour couvrir leurs arrières. Cal ne comptait plus le nombre de fois où il s’était sorti du pétrin parce que les gens ne faisaient pas confiance à leurs sens ou ne les utilisaient même pas.

Cal traversa la flotte, à l’affût du moindre signe indiquant qu’il était repéré. Jusqu’ici, tout allait bien. Il dépassa ce qui ressemblait à un vieux vaisseau agricole qui contenait probablement les cultures hydroponiques servant à alimenter tout le clan Vanduul. Il se traînait et laissait échapper des trainées de fumées dans son sillage.

Le commandement essayait d’établir des bases de données sur chaque clan Vanduul, mais ils peinaient toujours à obtenir des données brutes. Depuis tout ce temps que les humains repoussaient les Vanduuls, Cal était toujours sidéré qu’on en sache si peu sur eux. Le fait que l’espèce elle-même soit si fragmentée n’aidait en rien. Bien que chaque flotte/clan Vanduul possédât ses propres traditions, affiliations diplomatiques et même religions, il y avait quelques constantes. Leurs chasseurs étaient étrangement similaires, de même que leurs vaisseaux amiraux. Beaucoup d’analystes s’arrachaient les cheveux en tentant d’expliquer ça. C’était presque comme si leurs plans étaient gravés dans leur ADN. Ce qui avait été suggéré.

D’un autre côté, peu de gens avaient été dans la position de Cal et s’étaient trouvés si proches d’une flotte Vanduul. Il en tirait donc le maximum, photographiant et classant chaque vaisseau à mesure qu’il les dépassait. Les renseignements militaires allaient être à la fête avec ces données.

Quelqu’un regarda par le hublot.

Cal avait à peu près trente secondes avant d’être submergé. Il démarra le moteur et longea la coque du vaisseau amiral. Il ne pouvait pas se contenter de mettre les voiles; même s’il parvenait jusqu’au point de saut, il n’avait toujours pas découvert ce qu’ils préparaient. Non. Il devait rester dans les parages.

Les chasseurs Vanduul rugirent en sortant de leurs baies d’envol, menés par Serre Noire. Ils obliquèrent vers l’imprudent humain, qui n’avait plus longtemps à vivre, et le trouvèrent en train de mettre la gomme vers le point de saut.

Les Vanduul se lancèrent à sa poursuite et le rattrapèrent bientôt grâce à leur vitesse. Serre Noire déchaîna la première salve de lasers. Le reste des chasseurs Vanduul l’imita. En quelques secondes, le vaisseau de Cal fut réduit en miettes.

Dommage, pensa Cal, alors qu’il se tenait sur le côté du vaisseau amiral, c’était un bon chasseur. Il remarqua aussi autre chose. Il y avait un autre vaisseau dans le lointain. Trop loin pour pouvoir l’identifier, mais ce n’était clairement pas un autre vaisseau Vanduul. Cal marcha le long de la coque, en direction d’un des trous béants provoqués par la bataille avec le Gemini, et grimpa dedans.

Cal se déplaça prudemment dans les entrailles du vaisseau, jusqu’à un couloir. La zone avait été scellée suite à la perte d’intégrité de la coque. Cal examina le verrouillage de la porte. C’était écrit en Vanduul, évidemment. Les caractères lui étaient complètement étrangers. Puis la porte se déverrouilla.

Cal se cacha avant que la porte ne s’ouvre en coulissant. Un Vanduul en combinaison étanche la franchit. Cal le surveillait depuis un renfoncement dans le mur, le pistolet à la main.

Le Vanduul s’approcha du trou dans la coque et l’examina. Ce devait être un technicien en train d’évaluer les dégâts. Cal jeta un œil entre le Vanduul et la porte ouverte. Le technicien lui tournait le dos. Cal se faufila par derrière et traversa le sas pressurisé, jusque dans le vaisseau proprement dit. Bien que ce fût agréable de retrouver la gravité, il ne pouvait toujours pas retirer sa combinaison car les Vanduul ne respiraient pas de l’oxygène.

S’efforçant de ne pas réfléchir au fait qu’il était ridiculement suicidaire de rôder à bord d’un vaisseau amiral Vanduul, Cal se concentra sur l’identité du nouveau vaisseau. Aucun chasseur n’avait été redirigé ou déployé lorsqu’il était apparu, donc Cal partait du principe que le vaisseau n’était pas une surprise pour les Vanduul. Dans ce cas, il se dirigeait sûrement vers la baie d’atterrissage.

Cal se déplaça prudemment le long des couloirs sinueux et en pente, évitant occasionnellement des officiers ou soldats Vanduul. Enfin, il vit une file de pilotes sortir par une porte. Peut-être l’un d’entre eux était-il Serre Noire? Cal attendit qu’ils aient disparu à un tournant avant d’examiner la porte qu’ils avaient franchie. C’était le hangar.

Il traversa les rangées de vaisseaux Vanduul pour enfin voir un Constellation lourdement modifié en train de se poser dans la baie. Deux douzaines de soldats Vanduul attendaient, les armes à la main. Cal trouva un bon emplacement pour se cacher et observer.

Le Constellation se posa sur le tarmac. Ses moteurs se coupèrent, mais quelqu’un occupait la tourelle. La baie d’atterrissage s’ouvrit. Deux humanoïdes sortirent. Tous les deux portaient des combinaisons étanches, visiblement incapables de respirer le même air que les Vanduul. Ils étaient à peu près de taille humaine.

Cal avait entendu parler de pirates faisant des affaires avec certains clans Vanduul, mais c’était plutôt rare. La plupart se faisaient mettre en pièces à l’instant même où ils étaient repérés par un vaisseau Vanduul.

Les gros équipements technologiques pris dans la colonie sur Yar furent amenés et chargés sur le Constellation. Un des deux humanoïdes examina l’équipement tandis que l’autre parlait aux Vanduul. Une fois satisfaits, ils apportèrent deux caisses.

Un fusil à plasma vrombit à l’oreille de Cal.

Merde.

A SUIVRE…

Source: https://robertsspaceindustries.com/comm-link/spectrum-dispatch/12766-Cassandras-Tears-Issue-4