J’ai connu un homme qui avait travaillé sur OSP-4 depuis le jour où ils l’avaient envoyée dans l’espace et mise en rotation. Il m’avait dit que la seule chose qui différenciait l’aile psychiatrique de l’aile politique était que la folie qui régnait dans cette dernière avait une cause.

Nous n’avions pas l’intention de nous y rendre, mais lorsque notre ascenseur se figea et que toutes les lumières virèrent au rouge, Wes Morgan entrouvrit les portes et nous découvrîmes que l’attaque menée par les Chiens de Nova avait éventré la cage. Nous étions sauvé d’une aspiration directe dans l’espace grâce à une pièce de métal qui, s’étant décollée d’un mur, était venue s’encastrer sous la cabine de l’ascenseur.

Nous étions logés dans la cage, mais nous pouvions tous entendre le doux sifflement de l’air qui s’échappait et donc nous descendîmes avec précaution. Aucun homme n’aurait souhaité être le dernier à quitter la cabine et risque une sortie écourtée dans le vide. Je les laissai sortir, après quoi il ne resta que Cayla Wyrik et moi. Ça avait du sens d’une certaine façon. Elle était ma thérapeute, la femme à laquelle j’avais été confié après avoir été démis de mon grade. Elle me regardait, je la regardais, et aucun de nous ne voulait sortir avant l’autre. En fin de compte, elle eu plus de cran que moi et me suivit à extérieur de la cage…

Juste devant le canon d’une arme.

Nos assaillants, comme beaucoup de personnes de notre groupe arboraient des tenues couleur orange prison, sauf qu’ils avaient peint des soleils rouges dessus et portaient des bandes de tissus blancs sur leurs bras. Ils attendaient devant les portes de l’ascenseur pour nous capturer et nous désarmer un par un à mesure que nous sortions.
Ils nous firent traverser le quartier pénitencier et monter des escaliers. Une fois arrêtés, nous vîmes un Tevarin tourner autour d’un centre de contrôle en parcourant les tablettes piratées et les écrans provenant d’un poste de garde qui le constituaient. Il était grand et plutôt musclé, la peau grisâtre, et il nous devait sa liberté.

« Nous nous retrouvons, Yusaf Asari. » dit Morgan avec arrogance. À ce moment précis nous avions tous les mains liées avec des sangles en plastique, ses mains étaient donc liées devant lui. Plusieurs autres Tevarin de la PAW se tenaient à proximité, pointant nos propres armes contre nous.

« En effet. » répondit Asari. « Que fais-tu ici, Morgan ?

– Du tourisme. On prend quelques photos, on boit un verre avec les locaux, ce genre de choses, enfin tu vois quoi. »

« Nous sommes ici par accident. » intervint brusquement Wyrick. La petite femme bonde en tailleur ne semblait pas vraiment à sa place au milieu de cette marée d’uniformes bleus et oranges qui formaient notre groupe, mais elle en faisait pourtant partie, au même titre que chacun d’entre nous.

« Notre ascenseur –

– Je me fiche de savoir ce qui vous a amenés ici. Je veux savoir où vous allez. » Le visage d’Asari était figé et son accent lui donnait une intonnation maladroite. « Nous sommes ici, les pirates sont dehors et personne ne circuelent entre eux et nous. À part vous. Pourquoi ? Qu’est-ce que vous cherchez ? »

Les Chiens de Nova, un groupe de pirates mené par un dénommé Martin Kilkenny, étaient des cannibales qui en avaient après un prisonnier en particulier, nommé Martin Browning, dont personne n’avais jamais entendu parlé, et ils étaient prêts à faire sauter la station entière pour mettre la mains sur lui. Ils avaient frappé sans prévenir, ciblant les postes de commande et les casernes avec une extrême précision. C’était à cause d’eux que Cayla Wyrick, qui portait le grade civile de Lieutenant, avait été promue directrice de la prison par l’ordinateur central de l’OSP-4. Elle était ce qui avait le plus de valeur de toute la station, et je ne savais pas si Asari en avait conscience ou non.
« On se tire de cette station. » dit simplement Morgan. Ma poitrine se serra. Qu’est-ce que Morgan était en train de faire ? La dernière chose dont nous avions besoin était de dire la vérité à ces types.

Les Tevarin qui nous encerclaient se mirent à rire. Tous sauf Asari. « Je te connais trop bien pour croire qu’il s’agisse d’une blague. Comment comptez-vous accomplir ça ? »

Morgan désigna Herschel Konicek d’un signe de tête. Il portait toujours la robe de chambre d’hôpital qu’il avait lorsque nous l’avions secouru de l’aile psychiatrique. « Herby est mon mécano. Il va réparer deux chasseurs au rencart dont Nylund nous a parlé, et nous allons nous en servir pour passer le blocus. »

Je dû me morde la langue pour ne pas demander à Morgan ce qu’il tentait de prouver.
Asari absorba l’information passivement. « Qu’est-ce qui vous fait croire que nous n’allons pas utiliser ces chasseurs nous-même ? »

Morgan haussa les épaules, maladroitement compte tenu du fait que ses mains étaient attachées devant lui. « Herby ne travaillera pas pour vous. N’est-ce pas Herby ? «
Konicek, toujours en train de redescendre d’un profond trip induit par les drogues que lui avaient administrées d’autres détenus, acquiesça et s’essuya l’oreille de ses mains jointes.

« Nous avons nos propres mécanos.

– Pas comme Herby. »

Asari regarda Konicek, à présent recroquevillé sur ses hanches, oscillant d’avant en arrière. « Manifestement. »

L’un des prisonniers à l’arrière commença à parler mais fut violemment interrompu par un Tevarin qui enfonça la crosse de son fusil dans son abdomen. J’étais content de ne pas avoir parlé.

« Nous avons sauvé votre vie. » dit Morgan calmement. « Apparement les Tevarin on la mémoire courte. »

« Les Tevarin ont la mémoire longue » le front d’Asari se fronçait. « Mon peuple se souvient de la bataille d’Idris IV et nous nous rappelons le jour où Cprath’Thai –

– Assez joué, Yusaf. Deux ans à échanger des mouvements d’échec sur des morceaux de papier attachées à des fils et maintenant j’éradique ton peuple ? » Morgan fit deux pas en direction d’Asari et tous les fusils de la pièce se levèrent d’un seul coup. Il s’arrêta et soupira. « Personne n’éprouve plus de sympathie que moi pour votre cause. La première chose que je ferai une fois sorti de ce tas de ferraille sera d’envoyer une note à votre peuple contenant les coordonnées de cette station, vous le savez bien. »

Asari considérait la proposition en regardant ses hommes, croisant chacun de leurs regards. « Les échecs c’est les échecs. Mais je ne te fais pas confiance Morgan. Laissez la fille ici.

– Bien-sûr, pas de souci. Maintenant coupez ces liens. » dit Morgan.

J’étais offensé par la vitesse avec laquelle il avait accepté les termes d’Asari. Il avait vendu Wyrick sans même une hésitation. Je ne pus me contenir. « Il n’est pas question que nous laissions Cayla avez vous- »

La crosse de fusil qui s’abattit sur mon plexus solaire me fit taire plus rapidement que je n’aurais aimé l’admettre. Je convulsais et me retrouvais au sol, luttant pour ne pas vomir à plusieurs reprises.

La voix de Morgan sonnait comme floue à travers le martellement du sang qui coulait dans mes oreilles. « Bien joué petit ! L’idée était de les convaincre qu’elle n’avait aucune valeur comme otage. »

« C’est, » dit Asari alors que je me remettais sur mes pieds. « précisément pourquoi je ne te fais pas confiance. La fille reste. Et vous aurez respecté votre part du marché. »

« Non, Je- »

Un nouveau coup de la même arme me remis à genoux. Je ne sais pas pourquoi j’avais recommencé. Évidement j’en étais venu à respecter Wyrick durant notre tentative d’évasion, mais ça ne me ressemblait pas de risquer ma peau pour quelqu’un d’autre. Non pas que je sois égoïste. Seulement la dernière fois que j’avais pris un risque, quelqu’un qui m’était très proche était mort. Agir comme un enfoiré est généralement plus sûr pour tout le monde. Alors pourquoi me mettais-je en danger pour elle ? Était-ce parce que je respectais comment elle avait battu une vingtaine d’hommes armés avec pour seule arme le son de sa voix dans l’armurerie ? Ou était-ce parce qu’elle me faisait suffisamment confiance pour m’avoir donné accès au système lorsque nous étions dans la salle des serveurs, sachant que j’allais utiliser cet accès pour mon propre bénéfice ?

« Je – Oh pour l’amour de dieu laissez moi parler. » Je ralentis lorsque je vis la crosse du fusil à nouveau. Asari me regarda puis fit signe au garde. Le fusil s’abaissa. « C’est elle qui a sauvé votre vie. Sans ses codes d’accès, nous serions tous morts. Et, malgré tout ce qui est arrivé, elle n’a jamais laissé un homme derrière. Pas un seul. Ni les meurtriers, ni les violeurs, pas même un ancien quartier-maître aux doigts poisseux. Donc aucun homme parmi nous – » Je regardais les autres prisonniers autour et trouvais un nombre surprenant d’entre eux en train d’acquiescer. « – ne la laissera en arrière à présent. Maintenant si vous voulez que votre peuple soit informé dans quel morceau de métal vous êtes enfermé, vous allez nous laisser passer. »

D’aussi loin que les discours passionnés remontent, ce fut l’un de mes meilleurs. Asari, dont le boulot était de diriger la minorité Tevarienne au sein de l’SOP-4 et par là même de donner des discours passionnés, n’était absolument pas impressionné. « Ou nous pouvons simplement vous tuer tous, ce qui ne nous fera pas plus avancer que tout à l’heure. »

« Je vais rester. » dit Wyrick. « Je ne suis pas capable de faire voler un chasseur ou un transporteur et je ne suis pas vraiment mécanicienne. Et je refuse de tirer sur qui que ce soit. » Elle se tenait sur ses pieds et, bien qu’elle était la plus petite personne dans la pièce, d’au moins une demi-tête, d’une certaine façon, elle semblait grandie. « Vous n’avez pas besoin de moi pour sortir de cette station. »

J’étais sur le point de protester, pas parce que nous avions besoin de ses accès pour quitter la station ou quoi que ce soit d’autre. Quelque chose de plus personnel.

Heureusement elle me coupa avant que je ne me mette dans l’embarras. « Vous avez tout ce dont vous avez besoin pour amener ces garçons là où ils doivent se rendre, Lieutenant Avery Nylund. Pensez juste à envoyer une équipe de recherche pour moi lorsque tout sera terminé, d’accord ? »

Et, aussi simplement que ça, nous l’abandonnâmes ici. J’espérais toujours que Morgan, notre mercenaire ultra-compétent, propose un plan pour la secourir. Dès que l’on aurait été hors de portée des oreilles attentives, il aurait suggéré de bousiller les conduites d’air, ou d’assommer les gardes avec des gaz incapacitants. Mais le plan ne vit jamais le jour. Les hommes d’Asari nous avait conduits à l’ascenseur en état de fonctionner le plus proche et nous avait donnés des mitrailleuses au lieu des armes que nous nous étions appropriées à l’armurerie, avant de nous laisser partir.

J’étais toujours engourdi lorsque nous arrivâmes au pont de chargement 1C, qui abritait les chasseurs et le transporteur de réserve qui allaient nous faire sortir de la station et nous permettre de passer le blocus de Kilkenny. Bien entendu, c’était verrouillé, et bien entendu je le fis remarquer à Morgan. « Voilà pourquoi nous avons besoin de Wyrick. Elle a tous les codes de sécurité. »

Morgan s’écarta de la console de la porte et donna un coup de réprobation dans la porte. « Non. Wyrick est trop maline pour ça. Elle savait que nous n’irions pas loin sans les codes. » il se gratta la tête puis me regarda. « Elle t’as bien appelé lieutenant, non ? »
Elle l’avait effectivement fait. Elle m’avait appelé ‘Lieutenant Avery Nylund’ pour la toute première fois. Même avant que je ne sois condamné, nous nous étions rencontré en passant, mais elle m’avait tout juste appelé par mon grade. C’est alors que je compris. J’avais effacé les enregistrements de ma condamnation dans la salle des serveurs, et l’ordinateur de bord avait dû automatiquement restaurer mon grade.

Ce fut avec une certaine satisfaction que je m’approchais de la console de la porte. « Empreinte vocale : Lieutenant Avery Nylund. Code d’accès : Comment maintenant vachement brunissant. »

L’un des criminels endurcit dans le font du groupe éclata de rire et je senti mes joues rougir.

« Quoi ? J’aime la façon dont ça rime. »

À suivre…

Traduit de l’anglais par Nathaniel Flint. Relecture et corrections par Hotaru
Source : https://robertsspaceindustries.com/comm-link/spectrum-dispatch/14078-Orbital-Supermax-Episode-Seven
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